The Moustache Day

Demain, nous sommes le vendredi 20 août.

Demain, c’est la JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA MOUSTACHE. Enfin, surtout parmi les gens de mon travail, parce qu’on n’a pas trop contacté le concert des nations pour convenir d’une date quoi. Mais tu peux te joindre si tu veux, on n’est pas sectaire.

Pourquoi demain ? Pourquoi une moustache ? Ce serait trop long à t’expliquer maintenant, j’écris ce billet sur un coin de table (enfin façon de parler hein, les extrémités de mes meubles ne disposent pas encore de clavier tactile, façon iCommode ou iGuéridon) pour que tu puisses prendre tes dispositions pilositaires en vue de demain.

Pour ces demoiselles, il est envisageable de commuer la moustache en une paire de couettes. Là encore, le pragmatisme doit faire autorité.

Je reviens demain pour t’expliquer de quoi il retourne. Et ce, impeccablement moustachu, comme il se doit.

Posté le: août 19th, 2010
Catégorie: Pêle-mêle
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Commentaires: 6 Comments.

Le bon vent qui t’amène (merci Google)

Aujourd’hui, parce que c’est l’été, je vais me pencher un peu sur le bon vent qui t’amène, lectorat musardeur, en ce bloûg.

Ou plutôt, les petits mots-clés que tu as tapé dedans ton moteur de recherche et qui t’ont conduit icelieu (merci Google).

Google avant le minitel mondial.

Ce billet est un immense classique du bloûgage, c’est même quasiment un marronnier, tout bloûg un peu LOL se doit d’y sacrifier. Par exemple des filles très drôles l’ont déjà fait avant moi et avec talent.

Personnellement, je me contenterai donc d’établir une typologie des différentes requêtes qui, hors des mots-clés “Circonflexions” ou “Circonflexions blog”, me drainent un lectorat flâneur, angoissé et/ou un peu pervers (raye donc la mention inutile).

LE MOT «BORGNE»
Oui, je fais pas mal de monde avec le seul mot “borgne”. C’est assez inquiétant. J’ai, à titre personnel, un nombre d’yeux à peu près pair, mais malheureusement personne ne tombe sur ce blog en tapant les mots “vision binoculaire” (bon, maintenant que je viens de le citer, ptet ça va changer). Et le mot-clé “borgne”, tu me l’assaisonnes à toutes les sauces, ami internaute, alors que “borgnesse” est au moins aussi joli, si ce n’est plus:
-”pute borgne anglais“: très clairement, là on a affaire à un mec qui souhaitait jurer en anglais, mais en restant local, genre sud de la France. Et qui hurle désormais «One-eyed whore» à chaque contrariété, un peu comme si on disait «baiseur de mère» en français dans le texte.
-”thierry la fronde borgne“: Curieux comme recherche. Ferait-on une comparaison entre le très nationaliste Thierry la France, et un autre bouteur d’ennemis-hors-de-France, M. “Jean-Ma” Le Pen, connu notamment pour son oeil unique?
-”surnom borgne“: On a tous un ami à oeil de verre (de Léon Gambetta à Jipé Sartre en passant par Albator). Lui trouver un surnom rigolo permet d’adoucir sa disgrâce en en faisant un sujet de fine plaisanterie. Je recommande donc le petit sobriquet «Chantal Sébire», plein de bon goût et d’à propos.
-Mentions spéciales à deux recherches voisines: “borgne jésus” et “rael est borgne“: Faut être borgne pour être un prophète crédible c’est ça? Tout ça parce que souvent Dieu est représenté comme ceci?

LES VRAIES QUESTIONS IMPORTANTES
… auxquelles je vais tenter, ou pas, de répondre.
-”que veut dire lexpression mieux vaut lire cela que d etre aveugle“: Ben, heu, a priori ça veut dire ce que ça veut dire, qu’il vaut mieux lire ça que d’être aveugle, quoi.
-”herve mathoux supporte quelle equipe“: Ça, ça sent son supporter aigri qui cherche à savoir de quelle chapelle se revendique l’animateur du Canal Football Club. “Ouais il a trop mal parlé de l’OL, chuis sûr que c’est un Parisien c’bâtard”. Non Kévin, Hervé Mathoux n’est pas un fan du PSG. Hervé Mathoux est un fan du glorieux Clermont Foot Auvergne, comme je l’ai rappelé ici avec un sens de l’info people croustillante qui ferait sans doute de moi l’un des trois meilleurs paparazzi du monde.
-”comment ècrire les trois points maçonniques SOUS OPEN OFFICE“: Je serais bien incapable de répondre, mais je suis très fier de compter parmi toi, lectorat, des francs-maçons adeptes des logiciels libres (et qui insistent en majuscules sur leur utilisation d’”OPEN OFFICE”). Quand on connaît la puissance des loges et le pouvoir de nuisance des hackeurs, je me flatte désormais d’être un BLOGUEUR INFLUENT. Tremblez, sphères politiciennes, vous n’êtes que des marionnettes devant Circonflexions.
-”marigny c’est sur quelle ville“: Euh. Comme nous le rappelle la page d’homonymie de Wikipédia, la plupart du temps Marigny c’est déjà une ville en soi, ça peut pas vraiment être “sur Paris” ou “sur Marseille”. Ou alors ceci n’est pas une question, mais une affirmation péremptoire vantant le sentiment de sécurité qui règne dans l’une de ces communes baptisées Marigny. Ce qui, avec la ponctuation, donne: «Marigny, c’est sûr ! Quelle ville !» Chauvinisme, quand tu nous tiens.
-Mention spéciale WTF: “quel est le nom de la bande que björn et gustaf dormi toute la nuit à discuter?“. J’ai relu au moins dix fois, je comprends pas trop le sens de la question, malgré la présence d’un point d’interrogation final (bel effort de l’internaute).
-”qui a inventé pain surprise“: Dans la glorieuse histoire du progrès de l’Humanité, dans cette inexorable mais chaotique avancée de l’esprit humain au rythme tâtonnant des expériences et des découvertes scientifiques, il y a eu la roue, il y a eu la gravité, il y a eu l’électricité, et, bien sûr, il y a eu le pain-surprise. Rendons ici un vibrant hommage (un hommage est toujours vibrant, comme par exemple une tension est toujours palpable) au vicomte Raoul du Petit-Veyre de l’Hamitiez (1854-1886), inventeur du pain-surprise, un mets prestigieux qui reste encore aujourd’hui le symbole immortel de la grandeur de notre civilisation, bien que son créateur soit mort étouffé avec un toast au saumon. Je réclame bien haut sa panthéonisation, avec cette épitaphe sur la pierre inaltérable de son lourd sarcophage de gloire: «Miam miam, mais qu’y a-t-il de bon sous ce couvercle?»
-”comment appeler jesus avec son portable“: (un de mes petits préférés) Jésus n’est pas joignable aux heures de bureau. Je suggère de lui envoyer un texto.

LES RECHERCHES DU TYPE «J’AI UN PROBLÈME URGENT LÀ» (MAIS C’EST PAS EN CLIQUANT ICI QUE TU VAS LE RÉGLER MON PETIT POTE)
-”je cherche un petit livre pour un anniversaire” N’importe lequel? Ok. Mamie va avoir 85 ans? Le petit neveu va sur ses 7 ans? Allez hop, voici un petit livre, par bonheur il est abondamment illustré. (Non mais sérieusement qui tape ça comme mots-clés dans Google??)
-”on ne decroche pas mais j’entends la conversation du numero apple“: Laisser les clients qui appellent la hotline d’Apple se lasser grâce à la méthode dite du «combiné posé pendant qu’on papote avec la petite stagiaire», une nouvelle politique d’entreprise depuis l’antennagate.
-”recherche magasin qui vend des urinoirs” et “urinoir chez soi“: «C’EST URGENT ! JE VEUX POUVOIR FAIRE PIPI DEBOUT DANS MON GARAGE !»
-”urinoirs pleins pieds“: soit l’internaute a connu un gros problème de fuite («Oh merde j’en ai plein les pieds»), soit il veut tout simplement évoquer des toilettes à la turque (de… plain-pied, donc).
-”reglementation tee shirt maitre nageur“: Ah oui important ça. Que dit le Code de la santé publique concernant les T-shirts des maîtres-nageurs? A-t-on le droit d’arborer un Three-Wolf Moon T-shirt en bord de pédiluve?
-”etre en forme et mieux se porter“: a.k.a. le réflexe Doctissimo. «Je vais poser la question à Google, il est sans doute de meilleur conseil que mon diététicien.»
-Avoir une envie de tartine à près de 9000 km de Romorantin, c’est possible, comme le prouvent les recherches “trouver des biscottes en irlande” et “krisprolls à Ottawa“. Bon courage à nos globe-trotters amateurs de Cracottes.
-”marie brizard mal ventre“: Autre réflexe Doctissimo, taper ses symptômes sur Google en espérant tomber sur un forum où d’autres mecs auraient fait part du même problème. Sauf qu’en général ce genre de forums est hanté par des teubés qui attendent de voir leur pénis gangréné avant de songer à consulter un vrai médecin. Au secours.

LES AFFIRMATIONS CATÉGORIQUES MAIS ÉTRANGES
Parfois, quand je ne sais plus ce que je devais chercher dans Google, j’ai le réflexe de taper “alors alors alors” dans la barre de recherche, le temps que ça me revienne. D’autres internautes font mieux: ils affirment des choses à la face du monde, et tant pis si ça déplaît, messieurs les censeurs. Un peu comme ouvrir sa fenêtre et hurler des choses dans la rue quoi (le Général de Gaulle aimait bien faire ça):
-”seul l’inattendu“: oui d’accord. Seul l’inattendu. Ca reste en suspens, c’est bien, chacun peut un peu personnaliser.
-”jamy est fred“: Quoiquoiquoi ??? JAMY ET FRED NE FERAIENT QU’UN ?? En même temps quand on y réfléchit, on les voit assez rarement ensemble à l’écran. ON NOUS CACHE DES CHOSES.
-”elle aime les sandales a picots“: Ah oui ben c’est bien, on est content pour elle.
-”je possede un numero de telephone portable suedois“: LOL LOL LOL WTF ABSURBE.

LES CURIEUSES PERVERSIONS
Finissons par du gros, du sale, du sexuel, car L’INTERNET est une raclure de bidet, dans le fond:
-”fille cherche filles autel damour+numero phone“: J’ai des lectrices lesbiennes, ça c’est cool, mais en revanche des lectrices lesbiennes qui sont soit dyslexiques, soit naïves, c’est-à-dire qu’elles pensent passer la nuit à l’hôtel, et puis finalement se retrouvent aux Pays-Bas devant l’autel pour un mariage gay en bonne et due forme.
-”mec qui pisse sur le drapeau d argentine“: Requête d’un Anglais ça. Ou d’un Brésilien. Ou du centre Simon-Wiesenthal, un peu énervé de l’accueil reçu à Buenos Aires par les uniformes vert-de-gris.
-”kabbale judaique et merde“: Hum. Moi qui croyais que le Golem avait été façonné avec de la boue.
-”filles nues good morning england“: Excellent film, mais j’ai pas souvenir qu’il y ait beaucoup de petites pépées dénudées dedans.
-”les dragouilles pour trouver l’odeur mystere“: Sans doute quelqu’un qui cherche une technique de drague (“les dragouilles”) efficace pour pécho et rentrer accompagné, afin, ainsi, de pouvoir découvrir les grands mystères de l’anatomie féminine (et les odeurs qui vont avec). ON NAGE EN PLEIN ROMANTISME.
-”faire l’amour sous la contrainte“: Romantisme toujours. En termes judiciaires, l’expression exacte est “se faire violer”.

Voilà voilà, à l’instar des plus beaux bêtisiers télévisés, on finit l’année scolaire sur ce petit best-of. Eh oui. Je n’ai rien inventé.

C’est l’heure de partir en vacances, c’est l’heure de kiffer un peu oué oué, je vais en Irlande pour me faire insulter à la place de Thierry Henry. J’espère pouvoir y trouver des biscottes, visiblement y’a pénurie.

Bisous les kids.

PS: quand je reviendrai, je te parlerai moustache.

Vis ma vie de Belge

Mercredi dernier, c’était la fête nationale de les Belges. Qu’il me soit permis ici de leur faire des poutoux tout partout.

Car les chiffres sont sans appel: un dixième de toi, lectorat de ces trois derniers mois, est un ressortissant de la Belguique. Un sur dix. Bam, si y’a cent connexions d’un coup (bon, ok, j’en suis loin), dix d’entre toi ont le coeur noir-jaune-rouge. Fieu.

C’est incroyable, hein Bébert ?

Albert II aime les jolis tissus.

(Ce qu’il a de bien avec Bébert, c’est qu’il aime les matières nobles et les tissus d’ameublement.)

Ce billet est donc consacré à toi, ami(e) Belge, mon voisin, mon presque-frère. Tu m’enverras une caisse de gueuze, tu seras gentil.

Tout récemment, je suis allé dans le Bordelais. C’est-à-dire en Gironde, où les départementales serties de vignes serpentent entre châteaux prestigieux, domaines de renom et caves réputées, et retentissent du doux glouglou des goulots dégorgés. On m’avait indirectement convié, en tant qu’arrière-ban de l’amitié (comprendre: pote de pote), à une soirée piscine dans une grande maison campagnarde à jardin.

Je ne pouvais décemment pas me dérober. D’autant que je n’y connaissais personne, qu’il devait y avoir, je cite, «des jolies filles qui sont en droit», et que c’était par conséquent l’occasion idéale pour réaliser une grande prestation scénique (comprendre: tenter de tenir une vaste supercherie toute la nuit sans flancher).

En discutant avec les copains qui m’invitaient à cette soirée, on a réfléchi à divers métiers susceptibles de donner du rêve à l’étudiante sympathisante UMP. Emergèrent successivement les professions médicales (dentiste, sage-femme), mais il y avait le risque de tomber sur «des jolies filles qui sont en médecine» ; puis les professions où on gagne bien sa vie (agent immobilier), mais vu que je suis mal rasé et chaussé de Converse j’ai bof le profil ; puis enfin la belle profession d’archéologue, chercheur reconnu qui reviendrait d’une fouille en Azerbaïdjan, menant une vie de danger avec un chapeau et un plumeau aux quatre coins du monde.

«J'espère qu'il va arrêter de m'appeler Junior», songeait Indy.

On a donc commencé à chercher des noms de civilisations disparues en Azebaïdjan, merci Wikipédia, lorsque l’évidence s’imposa: incarner un archéologue, c’est chiant comme la pluie.

«Alors tu vois, là je bossais sur la tribu Uru, une tribu des hauts plateaux qui vouait un culte aux abricotiers, c’était très émouvant de mettre au jour tous ces vestiges d’époques révolues, tous ces témoignages d’un temps pas si éloigné du nôtre…
-Oui alors si je résume, ton métier c’est d’épousseter des morceaux de poterie sous le cagnard, quoi.»

Comme changer de métier c’était pénible, j’ai pris un virage à 180°. J’ai décidé de me faire passer pour toi.

(Ami Belge.)

On m’a donc présenté, dès le début de la soirée, comme extrêmement Wallon. Spéciale dédicace au dixième de toi, coquin de lectorat.

Un Belge, un vrai, né officiellement à Namur, mais installé en France depuis longtemps. À part cette bénigne usurpation de nationalité, le reste n’était que pure vérité: journaliste à Paris, ayant vécu un peu à Bordeaux, et la voix dépourvue du moindre accent, hein, ne sombrons pas dans la caricature crasse.

Ce fut une belle expérience scientifique. Je ne regrette rien.

Quatre constatations qui font que finalement, c’est pas si facile que ça d’être Belge en France:

1. Sans vouloir généraliser, oh et puis si, le Français voit le Belge comme une bête curieuse. Du coup, il ne lui parle que du plat pays et s’arrête à ça. C’était assez étrange mais ce soir-là j’ai très rapidement cessé d’être un être humain pour me contenter d’être une nationalité (et ce alors même que je n’en faisais vraiment pas des caisses sur mon émouvante jeunesse à Namur).
Admettons, pour les besoins de la sociabilité, que ce soit une porte d’entrée facile dans la conversation («ah, t’es Belge ? Elle est comment Maurane, en vrai ?»), mais de là à passer 30 minutes minimum là-dessus? Avec en plus certains interlocuteurs qui imitent pathétiquement l’accent belge (l’alcool aidant) et enchaînent les saillies sur les frites, merci bien, c’est horrible. Quant à la pédophilie, ah ah, c’était tellement récurrent qu’à un moment j’ai prétendu que la majorité sexuelle, en Belgique, était à 14 ans («Vérifie sur ton iPhone si tu veux. Ah mais oui c’est vrai y’a pas de réseau ici.»)

2. Aspect assez rigolo, c’est qu’on m’a demandé ma petite expertise sur un peu tous les sujets, façon: «Et vous, en Belgique, ça se passe comment ?». Notamment sur la situation politique du pays et le risque de partition. Moi, pas bégueule, on me demande mon analyse, je la livre la plus sérieusement du monde: «À mon sens, franchement, le jour où Albert II disparaît, c’est la guerre civile… Il y aura des barricades dans Bruxelles. Moi quand je vais en Flandre, je me fais passer pour un Français pour éviter les problèmes.»

3. Bon, y’a pas eu que des aspects négatifs: j’ai eu une longue discussion sur Benoît Poelvoorde, dont je suis un inconditionnel depuis C’est arrivé près de chez vous – un film que je suis capable de réciter en entier debout sur une jambe face à la mer, c’est dire. Notons que ma propre vision de la Belgique doit être relativement biaisée.

4. POINT CULMINANT DE MA SOIRÉE: je discutais avec un jeune local, je parlais avec toute la pureté de mon accent de Clermont-Ferrand, c’est-à-dire sans contrefaire le moins du monde les sonorités wallones, lorsqu’au détour d’un propos quelconque, l’interlocuteur m’a dit cette phrase, d’un air très concerné: «C’est vrai que quand tu parles, on entend ton accent belge.»

ACTORS STUDIO. CÉRÉMONIE DES MOLIÈRES. Ou l’étrange pouvoir de la suggestion (et de l’alcoolémie).

Je compte dès cette semaine faire une demande de nationalité ; paraît que d’ici vingt ans, avoir un passeport belge sera un souvenir hyper collector.


Nuits belges

Affaire Torun: l’enquête piétine

Cher lectorat féru des faits divers dégoulinants que Christophe Hondelatte, filmé dans la pénombre devant un panneau punaisé de coupures de presse, raconte de sa voix basse avec la gourmandise d’un oiseau charognard qui déchiquète du globe oculaire ;

Je le devine, tu es friand d’affaires.

(Ces jours-ci, il est dans l’air du temps de parler d’«affaires». Je dirais même que c’est de «rigueur», tiens.)

Au sein de la coloc, on aime bien les petits dimanche soirs devant Faites entrer l’accusé, c’est toujours beaucoup d’allégresse. Surtout quand Cricri Hondelatte, la voix astucieusement modulée pour préserver le suspense, sort son gimmick: «L’enquête piétine… QUAND SOUDAIN»

«Si le tueur est arrêté, promis, j'enfile mon blouson en cuir»

Là, on trépigne et on boit du petit lait (mais pas les deux en même temps, c’est salissant).

Lectorat, si tu aimes les «affaires», tu dois te ressouvenir de ce micmac scandinave qui me déconcerta jadis, alors que j’étais jeune, fou, insouciant et pas encore barbudetroisjours, car 2009 restera à jamais l’an I de ma friche visagale, ah et à ce propos, il faudra que je te cause du 20 août prochain, décrété officiellement journée de la moustache, ça a trait à Mathieu Amalric, mais on a le temps d’en reparler, cesse de digresser veux-tu.

Donc il est question ici de Torun, cette petite princesse nordique qui anima une de mes matinées de juin 2009 (on notera que sitôt après, je cessai de me raser à blanc, et une telle concordance dans les dates ne manquera pas ne nous faire conclure à un profond traumatisme enfoui, d’autant que je ne crois pas avoir remangé des biscottes Wasa depuis).

RÉSUMÉ DES ÉPISODES PRÉCÉDENTS SI TU ES UNE GROSSE FEIGNASSE: Torun, rencontre suédoise d’un soir, décline une invitation à aller boire un verre, puis, trois mois après, m’entreprend de nuit sur le chat facebook, me tient la jambe trois bonnes heures et me convainc de me rendre à un petit rendez-vous le lendemain, auquel elle se soustrait avec la grâce du serpent, ou bien auquel elle ne se rend pas par quiproquo dans les numéros de téléphone, quoi qu’il en soit l’anecdote est rigolote.

Je n’aurais pas justifié mes copieux appointements au sein de la presse, la grande presse, si je n’avais pas profité du temps qui a coulé sous les ponts, ou alors était-ce de l’eau qui est passée par ici et qui repassera par là, peu importe, pour connaître un peu les dessous, tenants et aboutissants de cet événement si fondateur, à l’évidence, pour ma pilosité. D’autant que la protagoniste est rentrée en Suède depuis et qu’il n’y a donc plus guère d’enjeu.

Depuis un an, l’enquête piétinait (je n’m'en souciais guère, je n’m'en souciais guè-è-reuh).

QUAND SOUDAIN.

Rentrant nuitamment en mes logis, le cornet pas mal irrigué, je vois Torun connectée sur le chat facebook. Ca m’était déjà arrivé, mais je n’avais pas poussé le vice de la curiosité jusqu’à sortir de la réserve toute britannique que je conserve à la scène comme à la ville.

Oh et puis zut, au diable les convenances, j’aime bien savoir la fin des histoires moi.

-Hey Torun, what a delight, can I ask you a question ?
-Sure
-I’d just like to know, for curiosity, why you did not show up on that day ?

M’enquis-je.

-Which day? you were the one not showing up!

Ah. Heu, sauf que les souvenirs restaient assez précis dans ma tête, et qu’elle n’était pas là du tout ce jour-là. Ce que je lui notifie, mais la belle maintient sa version contre la mienne.

Et elle me ressort au passage le message que j’avais envoyé le surlendemain, déjà à l’époque pour enquêter et la faire sortir du bois: “désolé de ne pas t’avoir rappelé avant-hier, j’étais très occupé tout ça tout ça, fais-moi signe si tu passes par Paris bisous.”

-You’re the dropout in this rendez-vous i planned

Ajouta-t-elle ingénument avant de se déconnecter. Erf, nous v’là pas plus avancés qu’avant.

L’enquête, ne nous le cachons pas, est désormais au point mort.

À l’instar du sexe du chevalier d’Eon, de l’assassinat de Kennedy et du secret divinatoire de Paul le Poulpe, gageons que l’Affaire Torun sera désormais rangée au rang des Grandes Énigmes de l’Histoire de l’Humanité, et je mets des majuscules partout pour faire solennel.

D’ailleurs, comme dirait Christophe H.: «Torun n’a pas été condamnée, le délai de prescription est révolu, elle est donc officiellement considérée INNOCENTE.»

Tadam, tadam, enfilage de blouson en cuir, éteindage de lumière. La semaine prochaine, je vous parlerai de Michel Fourniret, vous inquiétez pas vous verrez des poils.

Salmigondis

Bonsoir, bonsoir à toi, affable lectorat,

Opération vérité aujourd’hui sur Circonflexions, puisque je m’en vas, l’épithète guilleret et le point-virgule sautillant, t’énumérer toute une série d’anecdotes (complètement) authentiques, (notoirement) truculentes et (potentiellement) divertissantes qui sont censées adoucir en toi le légitime courroux causé par mon silence de ces dernières semaines en justifiant à tes yeux scrutateurs mon absence façon « dispense d’EPS en classe de quatrième B », encore que, ma première phrase comportant déjà trois adverbes et plus d’une centaine de mots, ça peut s’avérer pas mal indigeste aussi, prépare-toi une petite tisane pour faire couler tout ça, genre fruits des bois, c’est bon ça, c’est ce que les Italiens, malgré tous leurs défauts, nomment joliment « Frutti di Bosco » alors que bon, nous autres marins faut pas nous prendre pour des trompettes, le bosco c’est pas la forêt mais le maître d’équipage (je plaisante en fait je ne suis pas marin, je ne suis pas capitaine, quoique POR TI SERÉ POR TI SERÉ.)

Ce billet s’intitule “Salmigondis” parce que le dernier du genre s’appelait “Miscellanées” et qu’au prochain écherra sans doute le titre “Olla-Podrida”. Je fais dans le cohérent vois-tu.

Jouons-la chronologique, si tu veux bien.

MAI 2010:

Le mois de mai fut une vaste féérie de ce jour-ci à ce jour-là ; entre les deux, on a fêté l’anniversaire de ma coloc et pour l’occasion je portais un brumisateur en bandoulière (immense succès d’estime) ; un anniversaire d’ailleurs repoussé parce que le jour initialement prévu madite coloc avait une grippe et moi une bronchite, et une telle simultanéité dans les pathologies n’eût pas manqué de semer le doute quant au caractère totalement dépourvu d’ambigüité de notre cohabitation quotidienne si, par bonheur, nous n’avions pas eu deux maladies différentes ; dans cet anniversaire on n’a pas atteint le consensus des analystes en terme de canettes/bouteilles descendues en une soirée, notamment en raison de la présence d’un invité déguisé en homme invisible via combinaison intégrale lycra qui l’empêchait de boire totalement à son aise ; vu qu’on le reconnaît pas du tout je ne résiste pas à l’envie de te lâcher une pix, eh ouais, je suis comme ça:

déguisement homme invisible

Tu admettras que ce déguisement est officiellement le meilleur déguisement du monde du mois de mai 2010, surtout le chapeau ; peu après, j’ai appris que l’absinthe pouvait parfois pousser à des sommets de témérité confinant au grandiose sur fond de traversée de Paris un dimanche à six heures du matin pour aller apporter des croissants à autrui (je te raconterai quand y’aura prescription) ; une absinthe venue d’Espagne, qu’en gens ignorants comme nous l’étions, en Apollinaires de pacotille, nous dégustions comme des sagouins, c’est-à-dire pure, sans eau ni sucre, je me déteste rien qu’à l’évoquer, mais bon sur le moment ça réchauffait et pis on faisait la grimace genre c’est hyper bon alors qu’en fait ça arrache genre dix fois plus qu’une Tête brûlée citron à la boulangerie où on allait à la sortie du collège ; entre-temps j’ai ri avec une fille qui a de l’humour ; puis je suis allé jouer les hôtes verbeux façon Edouard Baer lors d’une remise de prix à Bordeaux (équipé d’une cravate noire, car la cravate noire, c’est le respect du public) ; et sinon à la fin du mois nous allâmes au festival Primavera Sound de Barcelone et c’était bien la meilleure chose qui pouvait m’arriver au monde tellement il faisait beau, tellement la musique était coolos (mes petits préférés: Pavement et The Charlatans), tellement la bière était gratuite dans la zone VIP que mon statut de +1 m’avait permis de squatter bien illégitimement (MERCI COLOC) ; en outre la ville est jolie, je me suis baladé un peu tout seul, j’ai déambulé sans but, j’ai observé en rêvassant, suis monté au Parc Güell, bref j’ai jaugé les chances que cette ville aurait de me plaire, et par bonheur elle est à moitié en pente et les gens parlent castillan alors j’ai succombé ; d’autant que, le samedi où j’estions à Barcelone, en pleine terre catalane, l’ASM Clermont-Auvergne, club de louseurs patentés que, tant par nostalgie que parce qu’il fait partie intégrante de la geste familiale, j’aime très fort dans mon petit coeur, eh bien l’ASM Clermont-Auvergne a fessé du Catalan perpignanais pour toucher enfin le bout de bois en finale du Top 14, et dire que j’avais boycotté ce match par superstition après trois défaites en trois ans vues à la télé ; autant dire que sitôt prévenus du résultat, ma coloc et moi étions un peu incrédules devant la levée de cette malédiction, on a cru à un fake au début, puis on s’est enhardis à hurler « On est les champions, on est les champions » sur le site du festival, on avait pas l’habitude tu comprends, d’ailleurs un ami anglais nous regardait faire en levant un sourcil interloqué so British ; mieux, je dirais même que son sourcil était circonfléchi.

JUIN 2010:

Le mois de juin fut une presque tout aussi vaste féérie, puisqu’il commença en disputant un match de futbol entre bloûgueurs sur la pelouse du Parc de les Princes, au titre du lancement par Orange de 2424actu Foot, un site d’actualité qui analyse un peu ce qui se dit sur Twitter à propos de la Copa del Mundo, et même que mon équipe (les bleus) on a gagné 4-3 ce qui me permet de prétendre À TOUT JAMAIS que « Je suis invaincu au Parc des Princes », allez, re-pix, j’aime crâner à peu de frais:

Gambader sur la pelouse du Parc des Princes

C’était gentil et y’avait d’autres gens du blog de foot dont je t’ai parlé, vas-y vas-y clique voir ; puis juin déroula son manteau de gens, de biture et de nuit, j’en ai bien profité je crois, je suis allé dedans le Périgord (1er barbecue de l’année), puis dedans les frimas du Cantal (1er hiver de l’été) ; j’ai beaucoup écouté Bensé et Gaëtan Roussel, notamment après avoir rencontré tour à tour le tour-manager de Bensé et le batteur de Gaëtan Roussel (namedropping éhonté façon “Paris est un village”) ; mes chevilles ont pas mal enflé, non pas à cause de la chaleur, mais parce que j’ai reçu mon premier mail de toi, joli lectorat (en l’occurrence d’une lectrice que je salue bien bas là-bas dedans son Allemagne lointaine), ça m’a fait du chaud dans le ventre, je ne me suis plus senti de joie, ah Dieu, n’hésitez pas, envoyez-moi donc comme ça des bouffées d’amour de manière à ce que je me sente un peu Frédéric François parfois ; bon, je n’ai toujours pas trouvé de bar de copains à Paname, mais j’y travaille, j’ai fait des petits tests à droite à gauche, plus ou moins concluants, cela étant mon jugement est biaisé ces temps-ci par la nécessité de trouver une terrasse avant de trouver un bar autour, alors bon, je ne veux pas te donner de faux espoirs, disons que le Café épicerie à Belleville et Dédé la Frite à Grands Boulevards ont marqué de petits points mais mériteraient un deuxième avis, alors que par exemple, le Sans-souci à Pigalle est trop étouffant par ces temps de canicule et de brumisage de vieux.

Comme tu le vois, ce fut chargé, alors s’il te plaît, n’en parlons plus.

L’été des amis

C’est acquis, cet été s’annonce placé sous le signe de la belle amitié.

« L’ÉTÉ DES AMIS », donc.

C’est un concept libre de droits, tu peux toi aussi l’appliquer à ton été 2010 si ta vie amoureuse est chaotique et ta vie professionnelle burlesque.

(Au passage je te dois, lectorat désabusé, un bien légitime battage de coulpe rapport à mon manque d’assiduité. Que certains auront interprété comme un décès, alors que non, ça va bien la petite santé, j’ai beaucoup voyagé voilà tout. Notamment dedans l’ascenseur émotionnel. J’y reviendrai. Donc je m’étais fait rare. Une manière de se faire précieux. Heu enfin pas précieux dans le sens « ho ce garçon avec sa chemise à jabot et son collant lycra il est très précieux, m’étonnerait pas qu’il en soit », vu que, à l’instar de la musaraigne et de l’orang-outan, je reste résolument judéo-chrétien. Bref enfin donc pardon, merci et bisou.)

Pourquoi la belle amitié ? demanderas-tu, lectorat-qui-retrouve-ses-marques-après-deux-mois-d’absence. Ah mais parce que la période s’y prête, voilà tout.

L'été des amis

Juin est là, avec son cortège d’apéros improvisés, de pique-niques arrosés, de libations qui s’éternisent. C’est le moment ou jamais de profiter des soirs orangés où rires et papillons vibrent dans l’air tiède. De converser jusqu’à plus soif en se gorgeant de tomates-cerises (“oué t’as vu ça me fait déjà un fruit ou légume sur les cinq qu’y faut par jour, allez je reprends de la terrine pour fêter ça”).

Il y a du peuple aux terrasses. Les amis, par grappe, prennent racine sous les treilles des rues piétonnes, à l’ombre des placettes, aux flancs des canaux. Les bruits des guitares estompent ceux des moteurs. Les filles rivalisent de débardeurs. On n’est pas malheureux, ma foi.

Parfois, on se dit que merde, chier, dans six mois c’est déjà l’hiver. Que ça y est, le jour le plus long de l’année est passé, qu’on glisse à petits pas vers les frimas et la bise du jour de l’an à la Tata-Georgette-qui-pique .

Raison de plus, donc, de profiter de L’ÉTÉ DES AMIS.

Oh, dans l’absolu, on pourrait tout aussi bien miser sur l’amour/la réussite professionnelle/la religion/l’équipe de France de football/les voyages loin loin/la résurrection-surprise de Pierre Desproges.

Sur tous ces plans, hélas, c’est un peu le bordel (je suis notamment sans nouvelles de Dieu depuis une demi-douzaine d’années, ça commence à m’inquiéter). Remémorons-nous au passage qu’en janvier dernier, naïf et guilleret, j’écrivais la phrase suivante:

Je peux annoncer, roulement de tambour, que, ces temps-ci, à la faveur d’une conjoncture étonnamment favorable, je suis très très heureux. (…) Disons que J’OSCILLE ENTRE 7 ET 9 sur l’Échelle du bonheur.

Je me le note en majuscule, en prévision de dans six mois, quand je serai retombé au fond du gouffre.

Une telle prescience de ma part me confond et m’esbaudit. (Il est important de s’esbaudir à intervalles réguliers. Ainsi, on oublie le gouffre abyssal de la Sécu, la dernière mélodie à la mode de David Guetta et la pénurie de papier-toilette le dimanche soir au fond des gogues.)

Adoncques, par gros temps faites le gros dos et misez sur les amis. Car l’amitié, au fond, c’est un peu le Livret A de la relation humaine (oué). Du solide. Du stable. Du gagne-petit, mais du gagne quand même. Mobilisable à n’importe quel moment. Sain. L’épargne à papa, pas trader pour un sou.

Par ÉTÉ DES AMIS, j’entends:

  • un été placé sous le signe des petits plaisirs, type: chanter faux, percer du papier à bulles, marcher pieds nus dans l’herbe, écouter de l’eau couler au soleil, jouer à un jeu quelconque, coincer une brindille entre ses deux pouces et siffler fort, médire des gens qui circulent dans la rue, picoler tôt, rentrer tard, lézarder au bord de tout ce qu’on voudra d’aqueux. Activités qui sont beaucoup beaucoup plus drôles entre amis, reconnaissons-le.
  • un été où on se donne pour règle de ne jamais refuser une bière (sauf dispense signée par les parents).
  • un été où s’enchaînent parfaitement Roland-Garros/la Copa del Mundo/le Tour de France/les délices fripons du mois d’août à Paris.
  • un été ponctué par les week-ends à droite à gauche, qu’est-ce que l’argent au fond de toute façon on n’aura pas de retraite. Bordeaux, Barcelone, Périgord = c’était bien. Coming soon: Auvergne, Île de Ré, Irlande = ça va être bien.
  • un été où on se dit que de toutes façons, pour tous les trucs relous là, genre chercher un autre appart un peu plus activement, eh bien on verra à la rentrée. C’est de la procrastination à l’échelle trimestrielle. Si c’est relou à faire, eh bien on aura tout le temps de le faire quand il pleuvra sur Paris. Faut avoir le sens des priorités.
  • Ainsi on réchauffe son coeur au soleil de la joyeuse camaraderie. C’est beaucoup plus écologique qu’un poêle à bois, quoi qu’en dise le charismatique Jean-Pierre Dupire.

    Jean-Pierre Dupire

    Mon prochain billet sera sans doute consacré à un résumé de ces deux derniers mois via une farandole d’anecdotes authentiques, truculentes et insolites, que je scanderai par des points-virgules pour faire branché.

    À La Culotte

    Attention, une troisième fois n’est pas coutume, j’m’en vas te parler un tantinet de futbol.

    (Après j’arrête, promis.)

    Déjà, pardon de m’être fait un peu rare ces derniers temps, mais faut dire que j’ai subi pas mal d’ascenseurs émotionnels. Et aussi, j’ai participé au lancement d’un petit projet bloggique qui pourrait te plaire, filou de lectorat.

    Ce blog de futbol s’intitule À La Culotte et il est très joli.

    À La Culotte

    Je vais y sévir un peu avec quelques copains, d’autant que la Copa del Mundo arrive sous peu.

    Je t’invite à aller voir même si t’aimes pas le foot, parce que justement y’aura des articles de fond qui répondent aux questions que tu ne t’es jamais posées sur le football, sur et en dehors du terrain. On va parler look, on va parler vintage, on va parler LOL. Le foot comme objet social, en somme.

    Oué. Ça va être bien je crois.

    Sinon, j’ai pas mal de choses à te raconter. Ne sois pas trop impatient, cesse de trépigner, je te promets qu’il y aura de la quête du bar-de-copains, il y aura du Barcelone, il y aura de la levée de malédiction, bref, si Allah le veut que du bon manger.

    Bisous les kids.

    Posté le: juin 3rd, 2010
    Catégorie: Pêle-mêle
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    Une posture esthétique

    Attention, une deuxième fois n’est pas coutume, j’m'en vas te parler un tantinet de futbol. D’ailleurs, je te l’avais promis .

    (Lectorat allergique, te voilà prévenu.)

    Alors voilà: en bon bougnat, j’apprécie très fort le Clermont Foot Auvergne 63.

    Oui hein bon.

    De deux choses l’une: soit tu n’aimes pas le foot, et tu t’es dit: “quel tocard” ; soit tu aimes le foot, et tu t’es dit: “quel tocard”.

    En effet, quitte à se faire lyncher parce qu’on aime la baballe ronde, autant soutenir un vrai club. Pas une équipe de seconde zone qui joue tous les ans le maintien en arborant pour sponsor maillot la PRESTIGIEUSE enseigne de bazars Babou.

    Enseigne dont le slogan est, je le rappelle: “BABOU, TOUT À PRIX FOUS”. Hum.

    Ça fait même marrer les intéressés, tiens.

    Ah ah en voilà une vareuse cocasse.

    Non mais bon soyons sérieux.

    Qu’est-ce qui m’a pris d’apprécier ce club-là plutôt qu’une grosse machine à gagner des matches ?

    Hypothèse 1: Une bête raison d’origine géographique ? Être né au pied des volcans, avoir grandi à l’ombre du stade Gabriel-Montpied ?

    (Même le nom du stade prête à rire, je te l’accorde.)

    Oui bon ok, en quittant son chez-soi pour le vaste monde, on devient chauvin, c’est bien légitime.

    Mais à ce compte-là, autant soutenir l’AS Saint-Étienne, c’est seulement à une heure de route de chez ma Mémé et pis ils ont une vraie équipe, un vrai stade, une vraie histoire, eux.

    Hypothèse 2: Alors peut-être est-ce pour son riche passé que je chéris tant ce club ?

    Euuuuh. Le Clermont Foot Auvergne 63 n’a jamais rien gagné à part deux titres de champion de National (la troisième division). Miteux. Pire: il n’a jamais connu l’élite. Pas plus que le Clermont Football Club, son prédécesseur, qui a fait vilainement faillite à la fin des années 1980.

    Seul fait de gloire: avoir éliminé le PSG de Loko, Le Guen, Lama et Raï en huitièmes de finale de Coupe de France en 1997, alors que les Parisiens étaient au sommet et le Clermont Foot en cinquième division.

    Souvenirs:

    Hypothèse 3: Le nom est joli.

    On fait difficilement plus ringard que “Clermont Foot”, comme nom de club. “Salut je suis supporter du Clermont Pied Auvergne 63″. Au secours.

    Hypothèse 4: Le logo est fastueux.

    Mhhhh. Vercingétorix (oui, c’est lui) qui bondit au-dessus d’un ballon ?? What the fucking fuck.

    Hey Jules César on se fait la revanche à onze contre onze ?

    Hypothèse 5: Toute la bonne ville de Clermont-Ferrand vibre pour ce club, et vu que je suis un mouton, je vibre de concert.

    Oui, sauf que non.

    Par chez nous, on est plutôt rugby, voyez. Question de paternalisme sauce Michelin, quand la grande manufacture de pneumatiques tentait d’occuper ses ouvriers le dimanche en les initiant aux rebonds facétieux du ballon ovale.

    Du coup, le vrai club-fanion de la ville, c’est l’ASM Clermont. A.K.A. le club de rugby le plus malchanceux du monde qui a perdu 10 fois déjà en finale du championnat de France. On est à fond malgré tout, chaque année. Ma Mémé écoute les matches à la radio et dit: “ah, cette année ce sera ptet la bonne, on sait pas”.

    Quand 15.000 personnes se tassent au Stade Marcel-Michelin pour le rugby, seulement 4.000 pelos viennent se les peler au Montpied pour le foot. Pareil pour les sponsors. Pareil pour les subventions publiques.

    BILAN: je supporte donc officiellement un club de football de seconde zone, sans stars, désargenté, issu d’une ville de province relativement méconnue où le public en pince plutôt pour le rugby. On n’a pas de stade, pas de vrai centre de formation, pas de base de supporters.

    Et pourtant, on est à quatre matches d’une éventuelle montée en Ligue 1. Bon, j’avoue, si on monte, on se fera piler et on redescendra aussitôt. Ce sera beau pour l’aspect gratuit de la chose.

    Que dites-vous ?… C’est inutile ?… Je le sais !
    Mais on ne se bat pas dans l’espoir du succès !
    Non ! non, c’est bien plus beau lorsque c’est inutile !
    Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, 1897.

    (Il faut avoir souffert dans les travées populaires d’un stade au nom d’entrepreneur paternaliste du premier XXe siècle pour comprendre l’amer double sens du verbe “supporter”.)

    Soutenir le Clermont Foot, c’est une posture esthétique.

    Le sacerdoce est d’autant plus beau qu’on n’attend rien de spécial en retour. On est résigné dès le début de la saison. On endure paisiblement les lazzi. On philosophe les défaites, on relativise les succès. C’est, en somme, du hooliganisme en toge grecque.

    Et, en silence, on rêve des étoiles.

    Ah tiens, Hervé Mathoux aussi supporte le Clermont Foot. Je me sens moins seul.

    Grenade

    L’air y est léger, la lumière précise.

    Le jeune Auvergnat vient s’y ébrouer ; il secoue son duvet d’enfant dans la clarté andalouse ; il éclot à l’ombre rouge des murailles mauresques.

    Il bat des ailes. Il prend son envol. C’est un oiseau migrateur.

    Des années plus tard, lorsqu’il a un peu vécu, il revient arpenter les ruelles blanches où éclate parfois un carré de soleil.

    On dit alors que c’est l’heure du bilan.

    (Calmement.)

    Là, tout est immobile. Dans les palais délicats, l’eau sifflote l’air vivifiant des altitudes.

    On s’équipe d’un rafraîchissement.

    On contemple.

    On est bien.

    Tout est là.

    Dans la main, le verre est glacé. L’odeur du printemps asticote les narines. Le soleil vous mijote les omoplates.

    La jolie touriste, au bras de son routinier, jette alentour des oeillades de captive.

    L’étudiante, allongée sur un muret, bouquine. Elle ignore encore qu’elle reviendra, après cinq ellipses autour du soleil, se pencher au-dessus des bassins de l’Alhambra, et y mirer le temps qui passe.

    L’antique forteresse, dans l’affairement des gens et le clapotis des eaux, a des airs de place de village.

    Grenade est restée la même, conclut l’Auvergnat. C’est moi qui ai changé.

    (Déduction éculée, songe-t-il. A notre époque, tout a déjà été vécu, tout a déjà été ressenti, et l’homme a déjà mis des mots dessus. Tout est redite. Il ne reste que le second degré pour se croire novateur.)

    Cinq printemps, cinq automnes.

    Cinq étés, cinq hivers.

    Les études sont finies, la voie semble tracée. Les parents, dans la maison vide, savent que leurs enfants font depuis longtemps du vélo sans roulettes.

    À la cave, le père retape un tricycle en rêvant de petit-fils.

    À Grenade, l’Auvergnat se demande à quoi il ressemblera dans cinq ans. Marié ? Expatrié ? Papa ? Parisien ?

    Impossible à savoir.

    “Je serai peut-être moustachu”, sourit-il. (La moustache sera très tendance en 2015. Vous l’avez lu pour la première fois ici.)

    Mais, même moustachu, l’Auvergnat reviendra à Grenade. Faire le bilan.

    Calmement.

    L’ayatollah du like

    Il y a quelque temps, une amie m’a qualifié d’« ayatollah du like ».

    Sous-entendu, « ayatollah de la fonction “like” sur Facebook ».

    Thumb up!

    Une fonctionnalité qui, en un clic, permet de signifier à tous vos contacts que vous souscrivez sans réserve à l’image, la vidéo ou la phrase qui vient d’être postée ; voire même qu’elle vous a fait vous gondoler comme une bonne grosse baleine.

    (Admettons, pour les besoins de la démonstration, que les baleines se gondolent — y compris les bonnes grosses.)

    Et une fonctionnalité qui, en sus, prend la forme d’un pouce levé vers le haut. Mouais. Comme aux plus sombres heures des jeux du cirque où le gladiateur vaincu attendait, tremblant dans sa petite slipette, qu’on lui signifie sa grâce ou son arrêt de mort.

    Je te préviens, j’ai une posture très tranchée concernant le like sur Facebook.

    (Il faut savoir être un bloûgueur engagé.)

    Depuis l’introduction de ce petit mécanisme début 2009, je n’ai pas honte de le dire, je ne m’en suis JAMAIS servi.

    Oui, JAMAIS.

    Alors que le poke un peu, c’est vrai, au début.

    *** C’EST VENDREDI SAINT, VOICI UN COURT INTERMÈDE AVEC JÉSUS ***
    Salut les kids, c'est Jésus.
    *** C’ÉTAIT VENDREDI SAINT, C’ÉTAIT UN COURT INTERMÈDE AVEC JÉSUS ***

    Pourquoi une telle intransigeance ?

    Demanderas-tu, affable lectorat, car tu aimes bien liker des vidéos de chats de temps en temps.

    Car le like, vois-tu, c’est:
    1. la mort de la nuance.
    2. la mort de la vanne.
    3. un troisième argument quasiment irréfutable.

    C’est la mort de la nuance, car Facebook nous enferme dans un schéma “j’aime/j’aime pas”, alors que bon, moi j’aime bien hiérarchiser un peu les choses, compliquer, pondérer, barioler. Par exemple le bonheur c’est pas “je suis heureux” ou “je suis malheureux”, y’a des stades intermédiaires bordel.

    Ah ! Facebook a fait de nous des monstres manichéens, le bien OU le mal, le blanc OU le noir, la fellation OU la sodomie.

    (Comme si c’était inconciliable.)

    Et c’est la mort de la vanne, car le like n’est pas un geste réfléchi. Une pression de doigt suffit, un peu comme avec l’arme nucléaire quoi (“Dites-moi, M. le chef d’Etat-major, qu’est-ce qui se passera si j’appuie sur ce gros bout… – krrrrrrrrrr – END OF TRANSMISSION”).

    Je dis non.

    Je dis révolution.

    Au lieu de liker, désormais, réfléchis à la vanne que tu pourrais faire à la place. Pouffe de ta répartie cinglante, puis poste-la.

    D’ailleurs, si tu as seulement ri et que tu n’as rien à rajouter, pourquoi ne pas laisser comme commentaire: “J’ai ri. Je n’ai rien à ajouter.”

    Tu y gagneras une réputation de joyeux(se) noceur(se), on s’arrachera ta présence et tes bons mots, puis on tentera probablement de te faire l’amour sous la contrainte. Enjoy.

    Mon bon lectorat, viens, rejoins-moi dans cette lutte pour l’élégance, la gouaille et le bel esprit. Car bientôt, la fonction like de Facebook sera étendue à tout le oueb.

    Horreur, apocalypse, fin du monde. Mahmoud likes this.

    Mahmoud likes this.

    « Like: l’ayatollah durcit sa position
    -Aïe aïe aïe, gémit l’ayatollette.
     »
    Inspiré de Pierre Desproges, Fonds de tiroir (1990).

    Posté le: avril 2nd, 2010
    Catégorie: Eurêka
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